Disons-le tout de suite. Il ne s’agit pas ici de prendre inconditionnellement le parti du régime iranien. Ce régime qui, notamment, et depuis sept ans, défend le dictateur de Damas contre une révolution légitime, réduite comme peau de chagrin à force d’ingérences. Mais il reste que la remise en cause de l’accord sur le nucléaire, soutenu majoritairement par la communauté internationale, est une source de questionnements.
Donald Trump est revenu sur ce compromis signé par l’Iran, les Etats-Unis et six autres puissances en 2015. Il a estimé que Téhéran pourrait se doter de l’arme nucléaire. Argument qui suppose que les signataires en 2015 étaient tous sans exception dépourvus du génie de Trump, venu à notre secours pour sauver notre planète d’une agression nucléaire ! Un peu d’histoire relativement récente lui rappellerait que le premier pays qui s’est rendu coupable d’un tel crime, ce sont les Etats-Unis eux-mêmes, contre le Japon.
Trump et son administration sont de la sorte directement responsables du déclin de l’économie de l’Iran, qui touche tout un peuple. Téhéran est devenu un paria dans le monde des affaires. Les PME et les multinationales qui contreviendraient à la décision américaine auraient bien du mal à éviter à leur tour des sanctions. Il est déplorable d’observer que toutes les nations, qui ont commencé par protester politiquement, ont fini par se plier économiquement au diktat américain.
Dernière épisode censé offrir, peut-être, un dénouement heureux à cette pitoyable affaire, le G7 mené par Emmanuel Macron, qui s’est tenu à Biarritz du 24 au 26 août 2019, réunissant les dirigeants des sept démocraties les plus puissantes économiquement, présenté par les médias comme « un incontestable succès ».
On y a surtout vu, lors de la dernière conférence de presse, deux hommes se portant diplomatiquement les meilleures attentions : « Je voulais vraiment vous remercier (….) et remercier la première dame qui a été active aux côtés de mon épouse, elle nous fait toujours l’honneur de sa présence en France et elle sait ô combien elle est populaire dans notre pays », a déclaré Macron, avant de conclure, « merci infiniment, président. » Trump s’est exprimé également dans les termes les plus courtois : « Je voudrais vous remercier pour le travail que vous avez fait, président Macron, et votre femme aussi, votre femme qui est une super première dame. »
Nous voilà ravis. Mais est-il admissible qu’un seul président remette en cause un accord international dûment signé par des régimes démocratiques, dont son propre pays ? Est-il admissible qu’il se serve du pouvoir démesuré que son administration peut exercer sur l’économie mondiale pour conduire la planète selon un unilatéralisme dangereux menaçant les équilibres internationaux, que d’autres tissent à force de modestie et de compromis ?
La finance gouverne le monde des nantis. La théâtralité de ces discours du G7, agrémentée de compliments faits aux premières dames, ne change rien à ce triste scénario et ne saurait cacher cette terrible réalité.
Hani Ramadan
Tribune de Genève,
L’invité, 2 septembre 2019