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Samuel Paty, et nous

Lu devant la communauté musulmane au Centre islamique de Genève, le vendredi 23 octobre 2020

Avec Samuel, qu’aurions-nous dû faire ?

Réunir tous les élèves de la classe,

et surtout n’en exclure aucun.

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Concernant la mort de Samuel Paty, nous devons rappeler qu’avec beaucoup de musulmans, notre position est claire :

D’abord, c’est le dialogue qu’il faut engager avec ceux qui estiment que l’injure et le blasphème sont des marques de civilisation. Le dialogue, et non pas la violence. Pour nous, la liberté n’est vraiment vraie que dans la dignité et le respect de nos semblables. Chercher à leur faire du mal à l’endroit le plus sacré de leur foi n’est pas un signe d’intelligence : juste le révélateur d’une profonde ignorance. Mal que l’on traite justement par l’éducation et l’instruction.

 Avec Samuel, qu’aurions-nous dû faire ? Réunir tous les élèves de la classe, et surtout n’en exclure aucun sous prétexte de ne pas vouloir le blesser : geste qui préfigure une exclusion programmée dans le sens d’un séparatisme absurde autant que dérisoire ! Puis ensemble, à l’école de la république, nous interroger sur le sens de ces caricatures. Ces dessins ne représentent en aucune façon le Prophète de l’islam, mais ils constituent bien plutôt la projection de ce que se figurent leurs auteurs. Par l’apprentissage de cette distance critique appréciable, on éviterait bien des tensions malheureuses.

Malheureusement, ces tensions servent des desseins politiques peu louables, et les acteurs qui les instrumentalisent fondent leur stratégie électoraliste sur la vague de l’islamophobie grandissante. On assassine Samuel une deuxième fois, lorsque le drame qui fut le sien devient un argument de l’extrême droite pour désigner les coupables en masse. Et une troisième fois lorsque la classe dirigeante actuelle en France reprend à son compte cet argumentaire de bas étage, et sonne la charge au galop pour récupérer des voix.

Finalement, quel est le problème ? Notre problème à tous, sans exception, juifs, chrétiens, musulmans, libres penseurs, hommes de toutes confessions et de toutes obédiences ?

– Nous ne savons pas aimer. Nous devons apprendre à aimer. C’est le grand message et la grande vérité. Quand on aime, on ne tue pas. On n’insulte pas. On ne brise pas le cœur de nos prochains. On ne cherche pas à faire peur de façon indiscriminée, en pensant que c’est « soit eux, soit nous », et en creusant des tranchées. On commence par pardonner, parce qu’il est bien naturel d’être convaincu que l’erreur est dans l’autre camp ; et l’on engage le dialogue.

C’est ainsi que la mort d’un enseignant pourrait vraiment servir à quelque chose. Au contraire, les clameurs de haine que l’on ne dissimule plus à l’encontre de l’islam sonnent en réalité une nouvelle fois le glas des valeurs républicaines. Elles annoncent un cycle de violences dont l’Occident garde jalousement l’alternance : inquisition, colonisation, guerres et génocides…jusqu’à quand ?

Face à une dérive programmée, les musulmans se doivent de contrer les excès à venir en respectant l’Etat de droit, et en suivant toutes les voies légales pour protéger leur intégrité.

 

Hani Ramadan

Directeur du Centre Islamique de Genève

Voir :

Dessinez le Prophète

https://www.youtube.com/watch?v=uUcxQRkZg_c

muhammad.jpg

Muhammad (Dieu le couvre de bénédictions et de paix)

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