Pauvre Israélien !
Tu es bien à plaindre.
Tu en es venu à observer avec soulagement ce qui se passe à Gaza : la boucherie qui vise l’extermination de la résistance palestinienne te comble de satisfaction. Depuis le temps que ton gouvernement parle de la sécurité d’Israël, cette obsession est devenue la tienne.
Bien sûr, un reste de conscience te dicte que bombarder ainsi des civils – tu es témoin des images atroces qui montrent des femmes et des hommes en pleurs portant à bout de bras les corps déchirés de leurs enfants, des maisons éventrées, des bâtiments effondrés… – est un acte d’une lâcheté ignoble ; mais aussitôt, pour rendre supportable ce constat, tu te dis que ces gens sont des terroristes. Ne t’a-t-on pas expliqué qu’ils ont tué trois jeunes juifs ? N’est-il pas évident qu’Israël doit ainsi se défendre contre les roquettes ?
Prétextes que tout cela, te dicte ta conscience, dans le tréfonds de ton âme. Tu sais bien que depuis plus de soixante ans, ton pays tue des innocents et vole la terre des Palestiniens. Depuis plus de soixante ans, ton pays ne s’est instauré dans cette partie du monde que par la violence et le crime.
Et voilà où tu en es à présent, à te ranger du côté des assassins à grande échelle : une armée qui massacre des civils sans défense.
Mais au fond de toi-même, une voix reste là qui te dit que tu n’es pas chez toi lorsque tu bouscules ainsi tes voisins, et que ta sécurité ne reposera jamais – tu m’entends, jamais ! – sur l’arrogance de ta force armée ; mais seulement – tu m’entends, seulement ! – sur la justice.
Le ciel de Gaza est rouge du feu de la folie meurtrière des hommes.
Mais la terre porte dans ses entrailles l’espoir qui accompagne la mort de chacun de nos martyrs. Il y a là un grand secret que tu ne comprends pas ; ni toi, ni ceux pour qui la résistance est synonyme de fanatisme.
Pauvre Israélien.
Tu es bien à plaindre. Comment en es-tu arrivé là ? A défendre des assassins ? Imagine qu’un soldat tire sur un seul homme désarmé ? Ce seul acte serait jugé par chacun de nous comme étant particulièrement infâme.
Multiplie ce meurtre par le nombre de Palestiniens qui tombent sous les bombes, et tu pourras ainsi, lucidement, te rendre compte que ces crimes contre l’humanité sont crapuleux. Tout comme sont crapuleux les chefs de gouvernements, la presse et les médias qui les justifient d’une façon ou d’une autre.
Tu es vraiment bien à plaindre. L’homme qui a perdu sa conscience a vraiment tout perdu. Le sang et la pierre maudissaient Caïn.
C’est pour cela qu’il n’y aura plus de paix, désormais, en Israël.
Ni au fond de toi-même, ni alentour.
Hani Ramadan