Alors que les uns proclament haut et fort la nécessité de respecter le principe de la liberté d’expression – et l’on notera que ce principe n’est pas absolu puisque les négationnistes tombent sous le coup de la loi et que cela n’offusque en aucune façon ceux-là mêmes qui prétendent que l’on devrait pouvoir tout dire – , d’autres brûlent, en d’autres climats, les drapeaux de ces nations occidentales qui osent bafouer les valeurs de l’Islam, en ridiculisant par le dessin et la représentation ce qui est sacré.
Aux uns et aux autres, nous avons envie de répondre en reprenant l’image que donnait un journaliste égyptien dans l’une de ses chroniques : Que l’on se figure un homme qui jamais n’aurait vu son ombre. Un jour, alors qu’il marche sur une grande scène, le long d’un immense mur blanc, il est soudainement ébloui par des projecteurs qui, à ses pieds, l’éclairent de bas en haut. Il se détourne, et que voit-il ? Une ombre formidable et gigantesque, qui fait dix fois sa taille. Saisi d’une frayeur indescriptible, il s’agite. Et l’ombre, bien entendu, s’agite aussi. Si bien que sa frayeur et son agitation augmentent et ne cessent de l’angoisser davantage. Tant que cet homme n’a pas compris que ce n’est que son ombre qu’il projette ainsi, il aura bien du mal à se sortir de ce cercle vicieux. Or, il faut bien considérer que le regard que l’Occident porte généralement sur l’Islam est tout, sauf objectif. Et lorsque l’expression artistique s’en mêle, la subjectivité peut atteindre des proportions telles que nous sommes complètement alors hors sujet. L’islamophobie se nourrit de ses propres fantasmes. Finalement, les caricatures de “ Mahomet ” ne nous renvoient-elles pas simplement à la vision grossière et naïve de leurs auteurs ? Le fanatique enturbanné, ce n’est pas le Prophète, mais le dessinateur lui-même qui révèle ainsi la pauvreté de ses références et l’inanité de sa représentation.
Et nous autres musulmans, si nous devons marquer très clairement notre désapprobation devant cette volonté obscène de dénigrement, dont le motif réel est la rentabilité de la presse et des médias, nous devons également prendre du recule, et plaindre ce pauvre homme qui s’agite et se fait peur. Car l’Islam est ailleurs et n’a rien à voir avec cette mise en scène ridicule. Notre réponse à cela, c’est de témoigner avec sincérité et clarté de la vérité universelle du message de l’Islam. Tous ceux qui ne confondent pas monologue et dialogue nous rejoindront sur le terrain combien riche et fécond de nos valeurs communes.