Nous avons à plusieurs reprises relevé que la presse et les médias sont largement dominés, en Occident, par les lobbies sionistes. Ce sujet ne devrait pas être tabou. Libre à chacun de nous soupçonner de « conspirationnisme ». Mais il s’agit simplement d’interroger les faits.
Les révolutions qui se succèdent dans le monde arabe représentent un véritable danger pour les projets d’hégémonie et de domination de l’Etat d’Israël dans toute la région du Proche-Orient. Israël s’entendait parfaitement avec les dictatures arabes, qui fermaient les yeux sur la colonisation continue de la Palestine. L’Etat hébreu se trouve en revanche confronter à la volonté populaire qui exprime une colère justifiée face à ses exactions et au silence de la communauté internationale, assujettie aux groupes de pression pro-israéliens. D’autant plus que ces révolutions, les unes après les autres, conduisent au pouvoir les leaders apparentés ou liés au mouvement islamique.
Il est donc parfaitement logique que certains journalistes qui se sont tus pendant des décennies devant l’illégitimité des tyrannies arabes, se mettent à présent à parler haut et fort pour dénigrer les dirigeants qui viennent d’être élus de façon démocratique. Fidèles à leur veulerie et à leur hypocrisie, que peut-on attendre d’eux ? Nous serions pourtant en droit de disposer d’une presse et de médias vraiment indépendants pour nous parler de ce qui se passe en Tunisie, en Egypte et en Libye !
C’est tout le contraire qui se produit. Exemple : le président Morsi bénéficie d’une popularité grandissante en Egypte. Dans sa vaste majorité, le peuple encourage son président. Les partis d’opposition forment en vain des coalitions qui restent dérisoires face à la vague du changement réel qui a bel et bien été entamé. Lorsque Morsi remet en cause le fonctionnement vétuste et corrompu d’une partie de l’appareil judiciaire qui date de l’époque de Moubarak, on l’accuse de confondre l’exercice du pouvoir et le domaine du droit. Pourquoi la presse ne dit-elle pas clairement que les magistrats qui ont été inquiétés s’agitent en vain pour éviter de devoir rendre des comptes à la justice, précisément ? L’intégrité de Morsi, qui ne fera pas marche arrière, est en l’occurrence exemplaire. L’homme n’a rien changé à son mode de vie. Il gagne modestement son salaire, n’a pas de compte caché, et ne veut pas en aucun cas se distinguer de ses concitoyens. Il a seulement l’obligation, en plus, de mettre fin au système mafieux qui a gangrené les institutions de la vallée du Nil. Or, nos médias, loin de rendre compte de façon précise de l’immense mouvement de solidarité qui unit le gouvernement et son pays, se font l’écho des voix discordantes et marginalisées qui brandissent la menace de la dérive islamiste du pouvoir.
Il s’agit concrètement de discréditer le fruit des révolutions, en soulignant que rien n’a évolué. Avec des remarques absurdes qui montrent que la situation reste chaotique depuis l’éviction des anciens despotes, comme s’il était possible de redresser économiquement, en quelques mois, une région pauvre, écrasée de dettes et exploitée pendant des décennies ! On répète que l’on regrette une récupération du courant de la rébellion par les extrémistes religieux. Déplorable métaphore lue ici et là : le printemps arabe s’est mué en hiver islamiste ! Il est vrai qu’à l’origine, la révolte n’était pas due à l’action des musulmans engagés, mais il convient de conserver à l’esprit, tout de même, que ce sont les jours du vendredi qui sont venus ponctués l’action et le rassemblement des foules. Sans l’organisation des Frères musulmans en particulier et du mouvement islamique en général, le chaos et le désordre civil étaient prévisibles !
Il n’est plus admissible que l’information soit véhiculée de cette façon. Les organes de presse ne respectent ce faisant ni la déontologie élémentaire du journalisme, qui souligne que le devoir d’informer repose nécessairement sur un souci d’objectivité, ni les régimes dont ils parlent en dénigrant les révolutionnaires aujourd’hui, alors qu’ils encensaient les dictateurs hier. Je rappelle pour les sceptiques que les Présidents Nasser et Sadate furent des autocrates au même titre que Moubarak. Il faut s’en souvenir. Où étiez-vous alors, vous qui insinuez grossièrement que le chef d’Etat élu en Egypte verse maintenant dans le « pharaonisme » ?
Et tout cela pourquoi ? Parce que les médias et la presse sont asservis aux lobbies sionistes. C’est bien pour cette raison qu’on en finit par fermer les yeux sur l’effroyable boucherie qui consiste à bombarder des civils à Gaza, et par oser dire que le Hamas s’en trouve heureux, parce que, artisan du désastre et terrer dans ses abris, il reconquiert ainsi sa popularité ! Lamentable perception de la réalité qui révèle une inhumanité sans fond, ou une duplicité infâme ! Mais qu’attendons-nous donc de ces hommes qui voient leur terre volée jour après jour ? Comment en arrive-t-on à les accuser de terrorisme et de violence, quand leur engagement ne porte qu’un nom, celui de la résistance ?
Nous réclamons donc de ceux dont c’est le devoir de nous informer qu’ils adoptent une nouvelle attitude. De la dignité, s’il vous plaît. Au nom de la souffrance du peuple palestinien. Au nom du martyre des Syriens que vos Etats prospères laissent mourir. Au nom du jour qui se lève en Egypte et dans le monde musulman, n’en déplaise aux détracteurs. Il s’agit simplement d’être juste et de dire sans détour la vérité. Un bon reporter ne peut être que le porte-parole des opprimés, jamais le complice des oppresseurs.
Hani Ramadan