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Islam et engagement - Page 11

  • L’ombre de Dieu et Moïse

    Aujourd’hui, 9 juillet 2023, il fait très chaud, et l’on nous annonce quelques jours de canicule suivis d’orages.

     L’histoire du prophète Mûsâ (Moïse) — II

    Comme toujours, il y a ceux qui vont se plaindre de ce réchauffement jugé excessif, tout comme ils râlent quand il fait très froid.

    Mais il y a ceux pour qui tout phénomène naturel est une occasion de se rappeler l’essentiel : en se mettant à l’ombre et en goûtant la fraîcheur offerte ainsi par un arbre, ils ont conscience que c’est là un don du Créateur. Oui ! De Celui qui a créé le soleil, les plantes et leurs feuilles. A peine soulagés des rayons ardents et étouffants, ils louent Celui qui leur a offert ce répit bienfaisant.

    Et il en sera toujours ainsi : il y a ceux qui se mettent à l’ombre et pour qui la scène ne va pas au-delà, et il y a ceux pour qui tout est signe. Pour eux, éclairés par leur foi, chaque élément de la nature est un mot sur la page de nos vies qui renvoie à Dieu.

    J’en étais à cette réflexion lorsque me revint à l’esprit un épisode de la vie du Prophète Moïse – Dieu le couvre de paix –. Fuyant Pharaon, le noble Messager de Dieu arriva à Madyan. Là, il fut témoin d’une scène que rapporte le Coran en ces termes :

    « Et quand il fut arrivé au point d'eau de Madyan, il y trouva un attroupement de gens abreuvant [leurs bêtes] et il trouva aussi deux femmes se tenant à l'écart et retenant [leurs bêtes]. Il dit : "Que voulez-vous ? " Elles dirent : "Nous n'abreuverons que quand les bergers seront partis ; et notre père est fort âgé".
    Il abreuva [les bêtes] pour elles puis retourna à l'ombre et dit :

    "Mon Seigneur, j'ai grand besoin du bien que Tu feras descendre vers moi".
    Puis l'une des deux femmes vint à lui, d'une démarche timide, et lui dit:   "Mon père t'appelle pour te récompenser pour avoir abreuvé [les bêtes] pour nous". Et quand il fut venu auprès de lui et qu'il lui eut raconté son histoire, il (le vieillard) dit : "N'aie aucune crainte : tu as échappé aux gens injustes". L'une d'elles dit : "Ô mon père, engage-le [à ton service] moyennant salaire, car le meilleur à engager c'est celui qui est fort et digne de confiance".
    » (Coran, 28, 23-25)

    La tradition rapporte que cette dernière appréciation était due au fait que Moïse avait avec force soulevé pour elle la pierre qui obstruait un puits voisin – pierre qui ne pouvait être enlevée que par dix hommes ! – et que lorsque la jeune femme le devança afin de le conduire jusqu’à son père, le vent souleva sa jupe et découvrit ses jambes, si bien que Moïse se mit devant elle et lui demanda de lui indiquer le chemin. Raison pour laquelle elle jugea que l’homme méritait d’être engagé, pour sa force physique et sa probité morale. Récit qui aboutit effectivement à un mariage.

    En ce qui concerne l’invocation que fit Moïse lorsqu’il se mit à l’ombre, « Mon Seigneur, j'ai grand besoin du bien que Tu feras descendre vers moi », on peut comprendre que Moïse, fuyant et étant en voyage, avait besoin de nourriture. Mais on peut comprendre aussi, que cet homme exceptionnel qui allait être investi de la mission consistant à délivrer le Message éternel du monothéisme et à libérer les enfants d’Israël du joug de Pharaon, – que cet homme a eu l’intuition profonde, en présence de ces deux femmes, que là se trouvaient sa nouvelle famille et la conjointe qui restait la meilleure compagne pour un homme dans la force de son âge !

    Chaque fois donc, que, dans la chaleur de cet été, nous cherchons un ombrage bienfaisant, que cela soit pour nous l’occasion de méditer et nous rappeler la bonté du Créateur.

    Et de Le louer de tout notre cœur !

    Hani Ramadan

  • Quelques leçons turques au lendemain des élections

    Retour sur l’élection présidentielle turque qui a vu la victoire du président sortant Erdogan.

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    Les élections présidentielles en Turquie et la victoire de Recep Tayyip Erdogan ont mis en évidence des points qu’il est utile de relever :

    La presse occidentale s’est appliquée, en général, à présenter Erdogan comme un dictateur. Ses opposants, dont Kemal Kiliçdaroglu, n’ont pas hésité à reprendre cette rhétorique en affirmant qu’il était temps de revenir à la démocratie. Sans même avoir conscience du caractère paradoxal de cette position : on ne renverse pas une dictature par un vote.

    Par ailleurs, les résultats sont tels qu’il est difficile d’y déceler des fraudes. Rarement un processus électoral n’a été observé d’aussi près pour garantir le respect de la volonté populaire. Au premier tour, le score a donné Erdogan gagnant avec 49,5% des voix, contre 44,89% pour Kiliçdaroglu. Ce qui démontre que s’il y avait eu une volonté de tricher, le chef d’Etat aurait fait en sorte de triompher au premier tour. Quoi de plus facile, quand on est si près du but et qu’on détient soi-disant tous les pouvoirs ! Erdogan l’emportant avec 52,1 % des voix au second tour, voilà qui confirme une volonté de s’en remettre au choix du peuple.

    Il est à noter que rien ne révèle la santé démocratique d’un pays autant que la mobilisation de ses citoyens. Dans l’Hexagone, par exemple, on observe qu’au premier tour du scrutin présidentiel de 2022, 73,7% des Français sont montés aux urnes. Remarquons que l’abstention a atteint 46 % chez les 25-34 ans. En Turquie, l’engagement massif des électeurs fut impressionnant avec une participation qui a frôlé les 90% au premier tour, et dépassé les 85 % au second

    Je préviens les objections qui pourraient être faites : la démocratie ne se limite pas au suffrage, mais elle couvre un certain nombre de principes qui nous attachent aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales. Soit. Mais alors, il faut être clair : il faut dire qu’une tendance prédominante, en Occident, veut que la volonté populaire ne devienne crédible que si elle s’accorde avec la sensibilité des sociétés dites modernes, qui ont systématiquement écarté de l’espace public la référence aux normes transcendantes et aux valeurs traditionnelles.

    Il faut dire aussi que cette logique revient à fermer les yeux lorsqu’un coup d’Etat est fomenté en Egypte et que plus de 60 000 opposants, dont beaucoup d’élus, sont incarcérés, sans réaction concrète des chefs de gouvernements européens et étatsuniens.  À fermer les yeux lorsque le dictateur tunisien actuel retient en prison arbitrairement le président élu de l’Assemblée du peuple, Rached al-Ghannouchi, et s’arroge tous les pouvoirs. Il convient d’ajouter également que certaines dictatures arabes sont parfaitement fréquentables dans la mesure où elles assurent des bénéfices considérables dans des échanges commerciaux qui suffisent à excuser le reste.

    Hani Ramadan

    Directeur du Centre Islamique de Genève

    24Heures

    Opinion, L'invité

    31 mai 2023

    L’invité: Quelques leçons turques au lendemain du scrutin présidentiel | 24 heures

  • Sermon : Un homme juste et bon en prison

    Rached al-Ghannouchi

    Un homme juste et bon en prison 

    En français : www.cige.org/Sermons/Rached-al-Ghannouchi-LaVoixDeLaLiberte-f.mp3

    En arabe : www.cige.org/Sermons/Rached-al-Ghannouchi-LaVoixDeLaLiberte-a.mp3

    Louange à Dieu, Maître des univers.

    Nous témoignons qu’il n’y a de dieu que Dieu et que Muhammad (Dieu le couvre de bénédictions et de paix) est le Messager de Dieu.

    Mes chers frères et sœurs en Islam, je vous recommande ainsi qu’à moi-même la piété et le fait de craindre Dieu.

    Rached Ghannoushi.jpg

    Nous vivons actuellement une période de troubles obscurs. Dieu – Glorifié soit-Il – et Son Messager (Dieu le couvre de bénédictions et de paix) nous ont dit la vérité à ce sujet, et nous avons été clairement prévenus.

    Allah dit – Exalté soit-Il – : « Et ils ne cesseront de vous combattre jusqu'à vous détourner de votre religion, s'ils le peuvent. » (Coran, 2, 217)

    Et le Messager de Dieu (Dieu le couvre de bénédictions et de paix) a dit : « Devancez par les actions (de bien) des troubles comparables à l’obscurité de la nuit sombre. » (Muslim)

    C’est ainsi que notre Prophète  nous a informés que viendrait un temps où les troubles seront tels que l’homme tombera dans la confusion et la perplexité ; plongé dans les ténèbres, ne sachant plus repérer son chemin et ne sachant plus où aller.

    Le Prophète (Dieu le couvre de bénédictions et de paix) a dit également : « Peu s’en faut que les nations ne se jettent contre vous comme se jettent les mangeurs sur leur plat. » (Abû Dâwûd, hadith authentique)

    Il ne fait aucun doute que ces nations, en règle générale, ne nourrissent pas les meilleures intentions à l’endroit de l’Islam et des musulmans. Et cela, quand bien même elles prétendent défendre les libertés, les droits humains et le respect de l’opinion populaire !

    Rien ne le démontre autant que ce qui arrive aujourd’hui en Tunisie. Le Shaykh Rached al-Ghannouchi, homme de savoir et d’engagement, qui est décrit comme étant un politicien et un homme d’Etat, un homme de droits et un penseur musulman tunisien, leader du mouvement an-Nahda, et dont on relève qu’il est le président légitimement élu de l’assemblée des représentants du peuple, – cet homme exceptionnel, qui n’a voulu pour son peuple que le bien et la liberté, a été conduit en prison sous le couvert d’accusations mensongères, derrière lesquelles se cache le dictateur qui a l’heure actuelle n’a pour but que de dominer complètement par la force son pays, suivant en cela le modèle du dictateur égyptien.

    Ce plan machiavélique est entièrement soutenu par certains gouvernements arabes, qui ne veulent surtout pas que leurs peuples se libèrent des dictatures qui leur sont imposées. Ces gouvernements sont derrières les coups d’Etat – qu’ils financent à coups de pétrodollars – et qui n’engendrent dans la région que chaos, désolations, massacres des innocents, cherté de la vie et famines.

    Ces gouvernements sont plus près de défendre les intérêts du sionisme que ceux de leurs propres peuples écrasés par la tyrannie.

    Et pour ce qui est de l’Occident, il nous revient de nous poser quelques questions :

    • Où sont passées les voix et les actions concrètes des hommes politiques qui considèrent comme sacrés les principes démocratiques ?
    • Où sont passés toutes celles et tous ceux qui défendent les droits de l’homme ?

    Tous ceux qui ont connu ou croisé Monsieur Rached al-Ghannouchi ont vu en lui un homme d’une vaste culture, qui suit avec évidence une voie d’ouverture au dialogue, fondée sur la liberté et le respect mutuel. Bien sûr, l’on peut ne pas être en accord avec lui sur certaines positions concernant l’engagement politique ou le droit musulman, mais l’homme est le premier à accepter et écouter, avec beaucoup d’humilité, les objections qui lui sont faites. Lui-même n’a de cesse d’inviter ses opposants à un dialogue continu.

    Rien ne peut justicier son arrestation, sinon l’arbitraire d’une dictature qui se met en place sans dire son nom !

    La vérité, mes chers frères et sœurs en Islam, est qu’en Orient et en Occident, alors que l’on appelle à en finir avec « l’Islam politique », c’est bien l’Islam que l’on vise, en le privant de toute forme d’autorité ou de visibilité, d’une quelconque façon.

    Il ne reste aux musulmans qu’une seule voie : se tenir fermement aux principes de leur foi, unifier leurs rangs autant qu’il est possible d’agir en ce sens, et comprendre ce que l’on attend d’eux afin de les égarer…

    Nous demandons à Allah de libérer celui qui s’est sincèrement engagé pour le bien de ses semblables, Rached al-Ghannouchi, ainsi que tous les hommes sincères et les savants qui sont actuellement incarcérés dans les prions de Tunisie, d’Egypte, de Syrie, de Palestine et d’Arabie Saoudite.

    Allâhumma âmin !